Si vous arrivez au Havre par la mer, il y a un moment où votre cerveau fait un petit « bug graphique » : au milieu des façades plutôt sages (voir austères), surgissent deux arches multicolores… faites de conteneurs maritimes. C’est la Catène de Containers (littéralement « chaîne de conteneurs »), une œuvre monumentale commandée pour les 500 ans du Havre en 2017, signée par l’artiste Vincent Ganivet.
Crédit photo Alexandre Prevot (CC BY-SA 2.0).
Une porte symbolique entre la ville et le port
Installée quai Southampton, la sculpture matérialise une sorte de porte entre le Havre « côté ville » et le Havre « côté port » : logique, vu que les conteneurs sont l’ADN visuel de n’importe quel grand port. À force d’en voir empilés partout, on finit par oublier que ces boîtes d’acier sont devenues un matériau “universel” — au point qu’on les recycle aujourd’hui en architecture, parfois avec un résultat franchement bluffant : découvrez par exemple cette maison en containers spectaculaire.
Et ce n’est pas juste “des boîtes empilées” : la Catène de Containers compte 38 conteneurs peints, pour une hauteur maximale autour de 28,5 m, et un poids total d’environ 288 tonnes. Oui, c’est un arc-en-ciel, mais version haltérophilie, on reste loin du Tetris original de 1984.
Crédit photo Katell-Ar-Gow (CC BY-NC-ND 2.0).
Pourquoi ça tient debout (spoiler : ce n’est pas de la magie, c’est de la “chaînette”)
Le mot “catène” n’est pas là pour faire joli : il renvoie à la courbe d’une chaîne suspendue. Vous prenez une chaîne tenue par ses deux extrémités : elle dessine naturellement une courbe. En inversant cette courbe, on obtient un arc caténaire : une forme qui travaille très bien “en compression”, et qui peut tenir sans contreforts si elle est correctement dimensionnée.
C’est une technique rendue célèbre en architecture (coucou Gaudí, dont Ganivet revendique l’inspiration). Mathématiquement, la caténaire est liée à la fonction cosinus hyperbolique :
y = a · cosh(x/a).
Pas besoin de la réciter sur place, mais ça explique pourquoi cette sculpture donne l’impression d’être à la fois massive et étrangement “fluide”.
Crédit photo Martin Falbisoner (CC BY-SA 4.0).
Bonus technique : le conteneur, ce “Lego” standardisé
Ce détournement marche aussi parce qu’un conteneur est un objet ultra-normalisé : une “brique” industrielle aux dimensions standard, pensée pour passer sans discuter d’un camion à un train, puis à un navire. D’ailleurs, quand on se retrouve face aux géants de la marine marchande, on comprend mieux pourquoi la standardisation est vitale : à bord du plus grand porte-conteneurs du monde, le Maersk Mc-Kinney Møller, chaque conteneur n’est plus une simple caisse… c’est une unité dans un puzzle mondial.
Et c’est exactement ce qui rend la Catène aussi efficace : elle détourne un objet conçu pour l’efficacité pure et le transforme en landmark artistique immédiatement lisible.
Crédit photo Fred Romero (CC BY 2.0).
Voir la Catène de Containers et autour ?
L’adresse de cette sculpture en conteneurs est : 44 Chau. John Kennedy, Le Havre, 76600, France.
Ses coordonnées GPS sont : 49°29’05.4″N 0°06’25.5″E (49.484829, 0.107093).
Voici sa position sur Google Maps:
Le Havre est aussi un décor parfait : son centre reconstruit par Auguste Perret est inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO (une ville en béton… qui assume). L’arc-en-ciel de Ganivet vient justement “réchauffer” cette rigueur géométrique.
Et si cette sculpture vous donne envie de regarder les conteneurs autrement, vous pouvez prolonger la curiosité côté “habitat” : certains projets montrent comment ces modules peuvent devenir une maison entière, et pas seulement une “caisse” sur un quai — par exemple une autre maison construite avec des containers, parfaite pour se faire une idée concrète du potentiel.
Crédit photo Katell-Ar-Gow (CC BY-NC-ND 2.0).
Sources pour aller plus loin
• Un été au Havre
• Transverse
• Unesco





